Les Olympiade des métiers (Worldskills) et le concours « Un des meilleurs ouvriers de France » sont des temps forts dans le milieu de la Finition. Alors que devaient se dérouler la 46e édition des Worldskills Compétition et le 27e concours UMOF, leurs contours doivent être repensés. Pourquoi ces changements ? Pour cause de Covid, mais pas seulement.
L’organisation des Worldskills chamboulée
Prévues en octobre 2020, les finales nationales des Olympiades des Métiers qui devaient avoir lieu à Eurexpo Lyon ont finalement dû être reportées avant l’été 2021. Le confinement a stoppé les sélections régionales et la situation sanitaire ne permet pas d’organiser ces finales en toute sécurité. Grâce à ce report, les jeunes ont plus de temps pour préparer une compétition d’un tel niveau et les établissements de formation ainsi que les employeurs ont le temps de redémarrer avant de se relancer dans les sélections régionales.
Quid des Worldskills Shangai prévus en 2021 ?
Kader Si-Tayeb, Délégué général France des Worldskills, précise à propos des incertitudes qui planent sur les conditions d’accueil de cette manifestation : « Oui [il y a des incertitudes]. Mais nous nous adaptons. Notre crainte est de réagir dans l’immédiateté et d’oublier notre mission. Si nous traversons une crise inédite, le mouvement WorldSkills est né après la seconde guerre mondiale pour préparer les générations à venir. Aujourd’hui, l’objectif est le même et nous préserverons la philosophie de ce concours de l’excellence. »
Par ailleurs, il conseille aux peintres qui se préparent pour les finales nationales de « continuer de rêver quelle que soit le contexte. À un moment ou à un autre, l’activité repartira. Mieux ils sont formés dans leur métier, plus ils seront prêts à affronter toutes les évolutions. L’adaptabilité n’est pas que réservée au personnel de bureau. Sur les chantiers aussi, et d’ailleurs la crise sanitaire l’a démontré, les compagnons ont réussi en peu de temps à faire le même travail de manière différente. »
Et demain ?
Kader Si-Tayeb ajoute : « […] Nous avons un très beau projet pour 2023 : l’accueil de la compétition mondiale. En parallèle, nous travaillons sur un plan de détection des jeunes car la génération 2023 est déjà en formation. Recevoir cette compétition mondiale est un privilège et un formidable outil pour valoriser les métiers. La France devra être bien représentée dans le Top 5. Le bâtiment est un de nos points forts, et la peinture en particulier. En 2023, avec ce métier, nous devons nous hisser sur un podium. »
Le concours « Un des meilleurs ouvriers de France » également repensé
Le Comité d’organisation des expositions du travail et du concours « Un des meilleurs ouvriers de France » a lui aussi amorcé des changements, initiés par la réforme de la taxe d’apprentissage.
Jean-Luc Chabanne, Secrétaire Général, apporte des précisions : « Désormais, le candidat doit défendre son projet et il n’y a plus d’anonymat. A contrario, il doit y avoir une commission des choix de sujets qui joue sur l’aspect de la confidentialité. »
« Nous avons mis en ligne un code éthique et déontologique sur notre site internet. Les personnes qui travaillent sur les sujets ne peuvent pas en même temps évaluer, être juge et partie. Ce sont des normes qui découlent de la réforme de l’apprentissage du 5 septembre 2018. Même si nous ne faisons pas de formation, nous sommes contraints dans ce cadre.
Depuis cette réforme, les salariés peuvent utiliser leur CPF (compte personnel de formation) pour dégager le temps nécessaire à l’épreuve mais les entreprises peuvent aussi le financer.
Il faut donc de la clarté pour éviter tout quiproquo laissant à penser que nous finançons l’examen. Le CPF vise un projet certif iant et c’est bien la certification professionnelle qui est finançable – le titre diplômant de MOF étant inscrit au répertoire des certifications professionnelles – et non pas le concours.
Dans notre pays, un grand nombre de personnes acquièrent leur savoir-faire pendant plusieurs années par le travail, et nous continuons à maintenir qu’il est formateur. Nos candidats en sont l’exemple. Pour la plupart, ils ont atteint le niveau d’excellence sans formation. »
La fin des sujets trop longs, trop chers et déconnectés de la réalité des entreprises
« Notre objectif a été de favoriser au maximum l’accessibilité à ce concours. C’est d’abord, la maîtrise d’un savoir-faire qui doit être évaluée. Par conséquent, avec le concours des professionnels de branche, les sujets rédigés sont plus prêts de la réalité économique, professionnelle et sociale. Ce qui signifie ne pas excéder 2 000 euros et 450 heures de travail. Maintenant, ce n’est pas nous qui décidons du choix des sujets mais les professionnels. Il existe un cadre. Il faut faire preuve d’imagination et de créativité, car c’est tout l’enjeu de ce concours. Encore une fois, l’idée est que le talent s’exprime dans les meilleures conditions avec sa compétence et son excellence. Il faut aussi que les branches professionnelles s’approprient les concepts car ils en sont les représentants. Ils doivent prendre leurs responsabilités, affirmer leur posture, car sans eux, il n’y pas de concours. » ajoute Jean-Luc Chabanne.
Quelles sont les incidences du Covid sur ce concours ?
« Nous avons décalé le début des épreuves qui réunissent facilement 60 à 100 personnes. On terminera toujours en 2022 avec un démarrage des qualificatives au premier trimestre 2021. Maintenant, bien malin celui qui pourra se prononcer sur ce qu’il va se passer dans les mois à venir. Parce que les candidats ont droit aussi de tenter leur chance, si à un moment donné le concours ne peut pas être ouvert au public, il sera à huis clos. Nous n’avons pas de services à rendre au public, mais aux candidates et candidats qui souhaitent exprimer leur talent et décrocher la certification. Pour l’instant, la prudence est de mise et tout est sur la table en termes d’hypothèses. Maintenant, pour nous l’après Covid-19, c’est l’essentiel, dissocier la reconnaissance de l’individu et la promotion d’un métier. Peut-être que la prochaine période triennale des MOF connaîtra des évolutions majeures en termes de diffusion de l’événement et de notoriété du concours. Si la Covid-19 nous pousse dans nos retranchements à un moment donné nous serons obligés de penser les choses autrement. »
Compte tenu du contexte sanitaire actuel, la bonne tenue de ces rendez-vous incontournables pour le secteur de la Finition reste donc incertaine.
D’après Reflets & Nuance, n°184, juillet 2020, p 64-66.