Les villes s’attachent à valoriser leur patrimoine urbain. L’élaboration de chartes de couleur et de nuanciers en cohérence avec l’histoire architecturale des différents bâtiments sont un des outils de valorisation. Outils qui s’avèrent précieux pour les entreprises, prescripteurs et maîtres d’ouvrage.
Harmoniser les couleurs dans la ville, donner un cadre en fonction d’un code pour les nouvelles et anciennes constructions, les villes, petites et grandes, sont de plus en plus nombreuses à mettre en place des chartes de couleur en annexe de leur plan local d’urbanisme.
Pour exemple, le nuancier de la ville de Toulon composé de 270 teintes. Sachant que celles-ci se répartissent en quatre typologies architecturales de bâtiment soit 69 teintes pour les immeubles anciens, maisons de ville et pavillons répondant au style architectural régional, 25 pour les bâtiments de type haussmanniens du centre-ville, 12 teintes pour les pavillons des années 1930 du centre-ville et faubourg et 24 pour les immeubles contemporains de 1950 à nos jours. Trois rubriques supplémentaires viennent en complément : décors façades, volets et menuiseries, ferronnerie. À Brest, en Bretagne, la ville édite, depuis 2016, pas moins de huit nuanciers par quartier ou type d’habitat. De son côté, la commune de Chaville va jusqu’à proposer des associations de couleurs entre façades, volets et encadrements.
Avec ces chartes et ces nuanciers, les villes ont toutes le même but : maîtriser leur image sur l’ensemble de leur territoire et pas seulement dans les centres historiques. Leur objectif est triple : harmoniser dans un souci de cohérence chromatique, s’inspirer des couleurs existantes et éviter l’effet polychrome des entrées de ville.
Couleurs et prescription
Pas toujours simple pour les maîtres d’ouvrage, architectes et entreprises de s’y retrouver. Pour éviter les conflits, les villes les plus organisées apportent une assistance dans le choix des couleurs, et ce, dans le cadre de la présentation des dossiers d’autorisation et de réalisation de travaux. Dans tous les cas, il est important de se renseigner lorsque l’entreprise intervient en prescription.
En général, les couleurs choisies sont à identifier par leur code RAL figurant dans la charte de couleur. Les documents sont consultables en mairie, sachant que de plus en plus souvent les communes éditent des guides présentant la charte et le nuancier avec les codes RAL, guides qu’il n’est pas inutile de se procurer.
Pour les projets d’envergure, cela peut aller plus loin. À Toulon, l’architecte Robert Flogia et l’entreprise Générale de Façades (GFC), en charge de la rénovation et de la requalification architecturale de la cité Rodeilhac, ensemble de bâtiments construits en 1932 pour loger les ouvriers de l’Arsenal, ont échangé en permanence avec la mairie pour répondre à la charte de couleur de la ville : « Nous leur avons fourni plusieurs échantillons et, au final, retenu trois couleurs », résume l’architecte.
Histoire chromatique des villes
À travers ces chartes et nuanciers, les villes souhaitent valoriser leur patrimoine urbain en définissant des gammes de couleurs appropriées aux façades de leur commune. Elles font donc appel à des designers coloristes dont la tâche consiste à établir un relevé des couleurs de la ville et à établir le nuancier en fonction. Leur objectif n’est pas d’en restreindre le choix mais au contraire de mettre à disposition des habitants un large éventail de coloris et d’associations de façon à valoriser le patrimoine existant ou en construction. Et ce, en harmonie avec l’histoire chromatique de la ville.
Ces harmonies de couleurs sont déclinables de différentes façons : en camaïeu en utilisant les différentes nuances de la même couleur de base, en contraste de valeur (couleur claire/foncée) et en contraste (couleur chaude/froide).
Parfois les villes vont plus loin encore en imposant le type de produit à utiliser. Voici ce que l’on peut lire dans le règlement de la ville d’Ajaccio, qui s’est engagée dans la création d’un site patrimonial remarquable : « Les badigeons de façade seront réalisés avec de la chaux naturelle, l’emploi de peinture minérale au silicate est autorisé. L’emploi de peinture à base de résine organique ou synthétique pour les façades doit être évité, il est interdit dans le cas de travaux de restauration. »
Pour autant, la finalité de ces chartes n’est pas d’imposer mais de donner des indications. À Nice, c’est clairement écrit dans la présentation du guide : « Ce nuancier ne revête pas un caractère exhaustif, mais est destiné à guider copropriétaires, syndics, entrepreneurs… dans leur choix de couleurs lors des ravalements de façades ».
Source : Reflets & Nuances, n°187, avril 2021.