Rénover les façades d’une tour, des travaux souvent complexes. Pour la tour Rive Gauche, située dans le quartier Beaugrenelle à Paris (15%), l’entreprise Marteau a mis en place des procédures originales. Objectif : décaper le revêtement amianté avant imperméabilisation et travailler en sécurité sur échafaudage volant culminant à presque 100 mètres de hauteur.
Située dans le 15e arrondissement de Paris, sur les quais de Seine, au-dessus du centre commercial Beaugrenelle, la tour Rive gauche, avec sa taille de guêpe et ses trente étages, est unique en son genre. Construite dans les années 1970 sur une dalle, comme on le faisait à l’époque, on ne peut pas la manquer. D’autant plus que ses façades viennent de faire l’objet d’un ravalement. Rénovation simple en apparence : « C’est très classique, on décape l’ancienne imperméabilité pour la remplacer par une nouvelle », résume Daniel Thibault, directeur opérationnel de l’entreprise Marteau, en charge des travaux.
En réalité, au moins deux problématiques fortes se sont posées sur ce chantier : un support amianté et l’impossibilité d’installer un échafaudage sur la dalle. « Lors d’une précédente intervention, un ragréage amianté a été réalisé sur la quasi-totalité du bâtiment », explique Daniel Thibault. Quant à l’échafaudage, « la mise en place d’un système tubulaire représente un coût économique important. En plus, il y avait des problèmes de report de charges sur la dalle laquelle n’a pas été prévue pour supporter un tel poids ». Pour les mêmes raisons, la plate-forme avec mât est éliminée. Reste l’échafaudage volant: « C’est une proposition de l’architecte et des copropriétaires. Franchement, je n’y croyais pas vraiment au départ mais cela s’est révélé être la bonne option. »
Plateaux électriques suspendus
Cette problématique sera donc résolue par la mise en place, sur les trois premiers niveaux, d’une structure autoporteuse d’échafaudage tubulaire – « Il convenait de limiter les ancrages dans un support amianté », précise Daniel Thibault. Structure qui servira également de support aux plateaux volants. Les vingt-sept autres étages seront traités par plateaux électriques suspendus avec câbles de guidage : « Ce choix nous permet de reporter la charge sur les fondations du bâtiment plutôt que sur la dalle ». Et inutile de le préciser, ça bouge : « Nous partagions les plateaux avec l’entreprise de menuiserie Verre et Métal, en charge du remplacement des baies. C’était une première pour eux ; il leur a fallu un petit temps d’adaptation ! » Un anémomètre a d’ailleurs été installé pour contrôler la vitesse du vent, sachant que celle-ci est très variable selon que l’on se trouve en partie basse ou en partie haute ». Les approvisionnements, quant à eux, sont réalisés depuis la rue, « par le bras de grue sur l’esplanade en passant par les quelques parties ajourées de la rue (souterraine) Gaston de Caillavet ». Concernant le décapage du revêtement, l’entreprise a fait le choix de la voie humide : « Il s’agit de travaux sur support amianté, il n’y a pas de plan de retrait », précise Daniel Thibault. Ces derniers sont tout de même réalisés avec une procédure et du personnel formé sous-section 4, après analyse des niveaux d’empoussièrement possibles. Le tout étant validé par le coordinateur sécurité, la médecine du travail, les instances représentatives de l’entreprise et la CARSAT (anciennement CRAM). Au plan technique, les parois ont été décapées avec un produit spécifique, Amiantol de chez Licef. Lequel a la caractéristique de rester gélifié pendant la phase travaux : « Pour l’éliminer, il suffit de râper le support. L’absence de rinçage à l’eau évite le traitement ». Ce qui n’était pas le cas auparavant : « Nous devions obligatoirement rincer à l’eau car il restait des paraffines sur le support ». Avec cette gamme de décapants, cette étape n’est plus nécessaire : « Cela représente un surcoût à l’achat pour le produit » mais qui peut être compensé par l’économie de main-d’oeuvre. Il n’empêche bien sûr que tous les déchets sont gérés : « Nous avions un double module de décontamination au pied des façades où les déchets ainsi que les vêtements étaient triés, emballés puis traités en décharges spécialisées avec BSD selon la réglementation amiante en vigueur », précise Daniel Thibault.
Calfeutrement et imperméabilité
Autre sujet important après le décapage, la réalisation des joints de calfeutrement qui ont tous été refaits, jonction menuiseries-maçonnerie, garde-corps, joint de structure… Sur une tour, la problématique d’étanchéité à l’eau et à l’air est importante, surtout dans les étages supérieurs. En effet, même lorsque le temps est calme, il peut y avoir du vent ». Un travail réparti entre l’entreprise menuiserie qui s’est occupée des joints au niveau des tableaux de baies et l’entreprise de peinture qui a fait le reste. Hormis l’ampleur et les conditions de ce chantier, les travaux restent classiques : « Nous avons réalisé les raccords de maçonnerie en prenant toutes les précautions nécessaires, puis mis en place un revêtement d’imperméabilité 13 autorisant la garantie décennale ». Revêtement 13 plutôt que 14, car l’entoilage toute hauteur sur ce type de bâtiment n’est pas simple. Le revêtement, lui, a une finition lisse pour retrouver l’esthétique d’origine du bâtiment : « Actuellement, on aurait plutôt tendance à choisir des finitions granitées ou talochées, qui masquent les imperfections du support ». Les parties basses de la tour sont restées en béton naturel : « Nous les avons lavées et traitées avec un inhibiteur de corrosion comme ceux que l’on utilise pour les ouvrages d’art. C’est la signature architecturale de ce bâtiment », précise Julien Robin, le conducteur de travaux de l’opération.
MAÎTRE D’OUVRAGE : LOGEPARGNE (SYNDIC)
ARCHITECTE: D. BEQUART
ENTREPRISE : MARTEAU (MONTREUIL 93]
DURÉE DES TRAVAUX : 14 MOIS
EFFECTIF MOYEN: 7 COMPAGNONS
LIVRAISON : OCTOBRE 2018
Source : Reflets & Nuances, n°177 Octobre 2018. Pp53-54